Boris Hippolyte, une vie entre quarks et gluons

Portrait Physique hadronique

À l’entendre parler, on pourrait croire que Boris Hippolyte est un ethnologue. Observateur méticuleux d’un microcosme peuplé de quarks dont il épie chaque particularité et chaque comportement au sein du plasma qu’ils composent avec les gluons. Il faut dire que le chercheur a un véritable attachement pour ce « plasma de quarks et de gluons », dont il parle avec une pointe de poésie. « Le plasma de quarks et de gluons est l’état primordial de la matière, et que tout l’univers actuel soit issu de là m’a surpris et m’a attiré. » confie le chercheur. Une passion jamais démentie qui le porte aujourd’hui à endosser le rôle de responsable du Master projet ALICE, dédié à l’étude du plasma de quarks et de gluons, pour l’IN2P3.

Spécialiste des triplets de quarks étranges

Force est de constater que depuis sa thèse Boris Hippolyte n’a eu de cesse de sonder ce milieu de tous les excès, lui arrachant patiemment ses secrets les uns après les autres. Il a commencé cette quête au RHIC au tout début des années 2000, sur l’expérience STAR réalisée avec ce tout nouveau collisionneur d’ions lourds dont s’était équipé le centre de recherche de Brookhaven à Long Island près de New-York. Un collisionneur taillé pour l’étude du plasma de quarks et de gluons. À l’époque, ce plasma n’était qu’un simple faisceau d’hypothèses concordantes qu’il fallait étayer par des observations simultanées. Sa spécialité à lui, c’était les omégas, des triplets de quarks étranges qu’il a extraits des toutes premières données afin d’en comprendre l’histoire au sein du plasma. Après 5 ans de recherches autour des mesures de STAR, Boris Hippolyte est recruté en 2004 par la Faculté de physique et ingénierie de l'Université de Strasbourg.

Reconstituer l'historique de l'évolution du plasma

Il intègre à cette occasion l’Institut pluridisciplinaire Hubert Curien (IPHC) et rejoint l’expérience ALICE (A large ion collider experiment) qui prenait alors ses quartiers au CERN, dans l’une des grandes cavités du LHC. La thématique est toujours le plasma de quarks et de gluons, mais cette fois l’outil est d’une précision incroyable. Tant et si bien que la collaboration va pouvoir entamer une véritable exploration systématique des propriétés du plasma. « C’est ce qui est enthousiasmant dans cette physique. Il ne s’agit pas juste de trouver quelques particules, mais de reconstituer la façon dont ce fluide se refroidit et se détend, et de reconstituer ainsi l’historique de son évolution » s’enthousiasme le scientifique. Avec la direction de groupes de physiciens de plus en plus grands, l’implication de Boris Hippolyte va croissante dans la collaboration ALICE.

Porte parole adjoint de la collaboration ALICE

En janvier 2017 il en devient porte-parole adjoint. Un poste stratégique où il doit participer à la planification d’activités liées aux évolutions du détecteur, s’assurer du bon fonctionnement de l’expérience, et surtout faire travailler ensemble 1900 collaborateurs issus de 40 pays et de plus de 170 instituts. Un poste passionnant et très prenant, laissant peu de place à autre chose reconnait le chercheur. Il se félicite cependant d’avoir préservé quelques heures d’enseignement en Master durant ces 3 années. Les étudiants doivent eux aussi s’en féliciter. Car bien qu’il se reproche de ne pas être très doué en vulgarisation, Boris Hippolyte inspire tout le contraire. De sa voix très calme et de ses mots savamment pesés, il est très fort pour donner vie à des quarks de différentes saveurs se frayant un passage à travers une goutte de plasma de quarks et de gluons surchauffé. Gageons qu’il sera tout aussi fort dans le pilotage de la participation des laboratoires de l’IN2P3 à l’expérience ALICE.