Installation miroirs du LAT de Simons Observatory (Chili)
L'installation des 2 miroirs de près de 6m de diamètre du télescope a été réalisée avec succès sur le site du Simons Observatory au Chili en février 2025. Cette installation constitue une étape majeure dans la construction du projet. Crédit : M. Devlin

Le Grand Télescope du Simons Observatory voit sa première lumière

Astroparticules et cosmologie

Simons Observatory (SO) étudie le fond diffus cosmologique, autrement dit la lumière la plus ancienne de l’Univers émise alors qu’il ne s’était écoulé que 380 000 ans depuis sa naissance. L’enjeu étant de comprendre ce qu’il s’est passé bien avant l’apparition des galaxies et des étoiles. Avec la mise en service de son télescope de grande ouverture, le site est désormais pleinement opérationnel avec une sensibilité qui dépasse de très loin tout ce qui avait été conçu par le passé. Simons Observatory  est un projet financé par la Simons Foundation. Il rassemble plus de 350 chercheurs de 35 institutions dans le monde. Le CNRS y contribue à travers plusieurs de ses laboratoires.

Le Simons Observatory (SO) a achevé l’installation de son télescope à grande ouverture, « Large Aperture Telescope », (LAT) en anglais, à proximité du sommet du Cerro Toco dans le désert d’Atacama, au nord du Chili. Ce télescope rejoint les trois télescopes à petite ouverture, « Small Aperture Telescopes » (SATs), déjà opérationnels sur le site

Ensemble, ils réaliseront des mesures complémentaires et d’une précision sans égal de la lumière la plus ancienne de l’Univers, appelée le fond diffus cosmologique et porteuse d’informations précieuses pour comprendre la nature des événements survenus juste après la naissance du cosmos. Les télescopes SAT sont dédiés à l’observation de petites portions du ciel pour tenter d’y déceler les infimes traces d’ondes gravitationnelles primordiales qui auraient été générées par une phase d'inflation de l’Univers primordial et viendrait ainsi conforter de façon éclatante le scénario actuel de formation de l’Univers. Le télescope LAT, quant à lui, est optimisé pour cartographier le ciel avec une résolution beaucoup plus fine. Il permettra notamment d'améliorer considérablement les mesures de la masse des neutrinos ou du nombre de particules présentes aux premiers instants de l'Univers.

« Ce travail est l’aboutissement de huit années d’efforts de la part de dizaines de chercheurs SO pour construire le télescope d’étude du fond diffus cosmologique au sol le plus performant au monde », explique Mark J. Devlin, co-directeur SO et professeur d’astronomie et d’astrophysique à l'université de Pennsylvanie.

Début 2025, l’équipe de Mark Devlin a minutieusement installé la caméra du LAT, un récepteur de 2,4 mètres par 2,6 mètres. La dernière étape a consisté à monter les deux miroirs du télescope, chacun d’environ 6 mètres de diamètre.

« Dès que nous avons installé le deuxième miroir, nous avons immédiatement entrepris les premières observations avec le télescope. Les premiers tests montrent que l'on s'achemine vers une réussite totale », ajoute Mark Devlin.

À la fin février 2025, peu après ce jalon majeur de construction, le LAT a obtenu sa première image céleste : une observation de Mars. Maintenant installé et testé, le télescope commencera à collecter des données dans les mois à venir.

Selon Suzanne Staggs, co-directrice SO et professeure de physique à l’université de Princeton, le succès des tests a été un immense soulagement pour l’équipe :

« Entre la phase de conception et la preuve de réussite, il y a beaucoup de nuits blanches. Ces premières observations du LAT sont donc une étape extrêmement satisfaisante qui confirme sa conception remarquable », explique-t-elle.
 « Afin d’atteindre tous les objectifs scientifiques du SO, notre équipe a conçu le LAT et sa caméra pour qu’ils offrent une sensibilité inédite et une qualité optique exceptionnelle. »

Le LAT et les trois SATs vont désormais scruter avec précision le fond diffus cosmologique. Ils s’intéresseront également à d’autres cibles dans l’Univers, comme les plus grands trous noirs dont ils pourront étudier les jets et les astéroïdes les plus importants de notre système solaire pour aider à déterminer leur composition.

« C’est formidable de voir ce dernier élément majeur de notre observatoire enfin en place », se réjouit Jo Dunkley, porte-parole de la collaboration SO et professeure de physique et de sciences astrophysiques à Princeton.
 « Nous sommes impatients de découvrir ce que l’ensemble des télescopes du SO va nous révéler sur l’univers. »

Image de Mars réalisée le 22 février 2025 pour tester les performances du télescope LAT
En guise de test, le LAT du Simons Observatory a capturé cette première image de Mars le 22 février 2025. Le résultat montre que le pointage du télescope est optimal, que les optiques donnent une image parfaitement propre et régulière et que les détecteurs, qui fonctionnent à 100 mK et perçoivent spécifiquement les ondes millimétriques, ont bien la sensibilité escomptée. 
Crédit : Collaboration Simons Observatory

Avec les quatre télescopes désormais opérationnels, le logiciel qui sous-tend le SO fait déjà fonctionner la mécanique de l'observatoire et gère les flux de données. 

« La mise en service du LAT signifie que le logiciel qui le fait fonctionner l'est également », explique Simone Aiola, responsable des données du SO. « Le logiciel contrôle désormais les mouvements des télescopes, analyse les données entrantes et sauvegarde l'ensemble sur deux sites en Amérique du Nord et un autre au Royaume-Uni. »

Des améliorations déjà en cours

Le Simons Observatory bénéficie déjà de nouvelles améliorations, notamment une augmentation de la sensibilité du LAT et l’ajout de nouveaux SATs, grâce au financement de la National Science Foundation, de l’UK Research and Innovation et de la Japan Society for the Promotion of Science.

Les contributions françaises au Simons Observatory

Les laboratoires français de CNRS Terre & Univers (INSU) et de CNRS Nucléaire & Particules (IN2P3) jouent un rôle central dans l’exploitation scientifique des données du Simons Observatory, avec des contributions majeures à plusieurs axes d’analyse.

L’Institut d’Astrophysique Spatiale (IAS, CNRS / Université Paris Saclay) est impliqué dans l’étude de l’effet de lentille gravitationnelle du CMB et son couplage avec les grandes structures de l’Univers, en lien avec la mission Euclid de l’ESA. Ces travaux permettent d’exploiter les corrélations entre différents relevés cosmologiques pour mieux comprendre la distribution de la matière à grande échelle. « En combinant les cartes de matière noire et lumineuse obtenues avec Simons Observatory aux données des relevés de galaxies comme Euclid ou de l’Observatoire Vera Rubin, nous pourrons explorer en profondeur les processus à l’origine de la formation et de l’évolution des structures cosmiques », explique Giulio Fabbian, directeur de recherche à l’IAS.

Les laboratoires APC (CNRS / Université Paris Cité) et IJCLab (CNRS / Université Paris Saclay) sont fortement impliqués dans l’exploitation des données des « Small Aperture Telescopes » (SATs) et du « Large Aperture Telescope » (LAT). IJCLab est notamment responsable de l’analyse du spectre de puissance angulaire du LAT, une étape essentielle pour obtenir des contraintes cosmologiques de grande précision. 

« Le Simons Observatory réunira à lui seul plus de détecteurs que toutes les expériences précédentes combinées. Cette sensibilité inédite promet des avancées majeures et rapides en cosmologie », souligne Thibaut Louis, chercheur au laboratoire IJCLab.

Le projet ERC SciPol (scipol.in2p3.fr), porté à l’APC, joue un rôle clé dans plusieurs aspects du traitement des données du Simons Observatory. Il contribue notamment à l’étalonnage par drones, à la modélisation instrumentale (modulation de polarisation), à la construction des cartes du ciel (map-making), à la séparation des composantes astrophysiques et à l’inférence cosmologique. « L’objectif est de maximiser la robustesse et la fiabilité des données, afin d’extraire avec précision les signaux cosmologiques recherchés », explique Josquin Errard, PI de l’ERC et chercheur au laboratoire APC.

Au total, une douzaine de chercheur·euse·s, postdoctorant·e·s, doctorant·e·s et ingénieur·e·s contribuent à la calibration, au prétraitement et à l’analyse des données du Simons Observatory. Ces efforts permettent une meilleure caractérisation de l’Univers primordial et de son évolution tardive.

Laboratoires CNRS contribuant au Simons Observatory

 

  • Laboratoire astroparticule et cosmologie (APC, CNRS / Université Paris Cité)

  • Institut d’astrophysique spatiale (IAS, CNRS / Université Paris Saclay )

  • Laboratoire de physique des 2 infinis Irène Joliot Curie (IJCLab, CNRS / Université Paris Saclay)

Pour en savoir plus

Le communiqué de la Fondation Simons (en anglais)

Le site web du Simons observatory (en anglais) - pour découvrir tous les détails du projet et découvrir de très belles images du site.

À la recherche de l’écho du Big Bang avec le Simons Observatory - actualité décrivant le projet (juin 2024)

L'infographie didactique du projet SciPol mené par Josquin Errard (en anglais)

Contact

Josquin Errard
Chercheur au Laboratoire Astroparticule et cosmologie (APC) Paris
Giulio Fabbian
Directeur de recherche à l'Institut d'astrophysique spatiale (IAS) Orsay
Nicolas Leroy
Directeur adjoint scientifique "Astroparticules et cosmologie"
Emmanuel Jullien
Responsable du service communication de l'IN2P3