Premiers résultats autour de l’expérience Belle-II
La collaboration Belle-II célèbre ses premiers résultats scientifiques avec la publication dans Physical Review Letters d’un article sur la recherche d’un hypothétique boson Z’, possible pont entre la matière et la matière noire. Les données utilisées ont été collectées à l’occasion d’un run de test en 2018. Aujourd’hui l'expérience continue sa montée en puissance et devrait atteindre le record de luminosité de la précédente expérience Belle cet été.
La collaboration Belle-II n’a pas attendu la fin de la montée en luminosité de son dispositif expérimental pour commencer à faire de la science. Dès le premier tour de chauffe de l’ensemble collisionneur/détecteur en 2018, les chercheurs ont collecté des événements qu’ils se sont empressés d’analyser. En l’occurrence, ils ont cherché à basse masse des événements particuliers qui seraient l’expression d’un nouveau boson, le boson Z’. Ce boson d’un nouveau genre ferait le lien entre le monde de la matière et celui de la matière noire. Sa découverte pourrait par ailleurs expliquer deux anomalies que le modèle standard est dans l’incapacité d’expliquer.
Le boson Z’ serait un pont vers la matière noire
Si ce boson existe, il devrait être possible de le produire avec les collisions électrons (e-) positrons (e+) de l’expérience Belle II du centre de recherche KEK au Japon. L’événement recherché correspond à une réaction dans laquelle la collision e+ e- donnerait naissance à deux muons + et – et à un boson Z’ invisible. Cette première collecte sur les données initiales n’a permis aucune découverte de la sorte, mais a donné l’occasion aux chercheurs de poser de nouvelles limites à l’existence du boson Z’. Leurs résultats sont compilés et analysés dans un article paru dans Physical Review Letters. La traque va continuer et bénéficier de la montée en puissance de l’expérience. A terme, l’échantillon de données qui sera pris en compte devrait croître d’un facteur 180 000. Laura Zani, qui a consacré sa thèse à cette recherche, est dorénavant en posdoc au CPPM et continue ce travail sur les jeux de données collectées en 2019 et 2020.
La physique autour du méson B a démarré
Pour la collaboration Belle-II, l’objectif principal reste cependant la production en masse et la caractérisation très fine du méson B, pour mettre en lumière une possible violation de la symétrie CP, signe de nouvelle physique. Là aussi les travaux de recherche ont commencé. « Depuis mi-avril, grâce à la mobilisation des chercheurs basés au Japon, nous sommes en prise de données constante et des shifts partagés ont été organisés en local et à distance, auxquels prennent part les équipes françaises. Si tout va bien nous aurons collecté un total de 100 fb-1 d’ici la fin juin » indique Karim Trabelsi chercheur à IJCLab et porte-parole adjoint de la collaboration Belle II. Un seuil qui devrait permettre aux chercheurs d’extraire leurs premiers résultats intéressants autour de la physique du B.
La luminosité record de Belle en ligne de mire pour cet été
Dans le même temps les opérations de montée en puissance continuent pour atteindre la luminosité de fonctionnement de 8×1035/cm2/s prévue pour le succès de l’expérience. « Nous avons réussi à atteindre une luminosité de 1.5 x 1034/cm2/s avec des courants encore modestes (400 à 500 mA) et collecter près de 1 fb-1 par jour ce qui est bon signe pour le futur, précise Karim Trabelsi. Le but est de dépasser cet été le record de luminosité de Belle, 2x 1034/cm2/s. Mais nous fonctionnons au jour le jour et dépendons des décisions prises au Japon et à KEK pour faire face à la pandémie de coronavirus ».
L’accent est mis en ce moment sur l’anneau haute énergie où circulent les électrons (HER). Son bruit de fond limite la montée en luminosité, et sa focalisation n’est pas encore optimale. Un « Crab waist », système constitué de sextupôles qui permet, en jouant sur la forme du faisceau, d’augmenter la luminosité sans pour autant augmenter le courant, y a été installé en avril pour compenser. Le même appareil avait été installé cet hiver sur l’anneau de positrons (LER) et avait permis de faire des progrès substantiels.
A propos de la collaboration Belle-II :
L'expérience Belle II est installée auprès de l'accélérateur et collisionneur e+e- superKEKB à KEK au Japon qui sera le plus lumineux au monde dans sa catégorie. Elle a pour but l’étude des propriétés des mésons beaux, charmés ainsi que des leptons tau comme un moyen de rechercher la physique au-delà du Modèle Standard. La collaboration compte environ 1000 physiciens. La France y participe au travers de trois laboratoires : IJCLab, l’IPHC et le CPPM.