Satellite SVOM : le laboratoire APC livre le masque codé de l’instrument ECLAIRs

Astroparticules et cosmologie

Le laboratoire Astroparticule et Cosmologie (APC) a livré au CNES le masque codé de l’instrument ECLAIRs qui équipera la future mission spatiale SVOM chargée d'étudier, à partir de 2022, les sursauts gamma1 . Ce masque était l’une des pièces les plus délicates à réaliser. L'ombre qu'il projettera sur le détecteur agira comme une signature de la direction d'arrivée des bouffées de rayons gamma. Son développement a réclamé une dizaine d'années de travail.

  • 1La mission franco-chinoise SVOM, mobilise, côté chinois, 12 institutions. En France elle est pilotée par le CNES et le CEA/IRFU et mobilise 11 laboratoires dont quatre de l’IN2P3 : l’APC (Paris), le CPPM (Marseille), l'IJCLab (Orsay) et le LUPM (Montpellier). 4 institutions allemandes, mexicaine et britannique participent également au projet.

ECLAIRs est l’instrument principal de la mission spatiale SVOM qui sera lancée en juin 2022. Une mission franco-chinoise développée en partenariat avec le CNES, le CEA et le CNRS. Une des cibles privilégiées de cette mission spatiale sont les sursauts gamma, des bouffées intenses de rayonnement gamma provenant des confins de l’Univers.

ECLAIRs permet la détection et la localisation des événements transitoires d’origine astrophysique dans la gamme d’énergie 4-150 keV (domaine énergétique des rayons X et gamma). Dans cette gamme d’énergie et afin de couvrir un large champ de vue, il n’est pas possible d’utiliser des lentilles ou des miroirs pour focaliser la lumière comme avec la lumière visible. La technique du masque codé, couramment utilisée dans ce domaine d'énergie, repose sur l’idée de coder le signal de chaque point du ciel avec un motif unique projeté sur le plan de détection. Cela permet de localiser l’origine des événements en analysant les ombres uniques projetées par les sources à travers les trous du masque. Il faut ensuite utiliser un outil mathématique de « déconvolution » pour déterminer statistiquement l’origine des photons incidents.

Le masque est posé sur un cadre. La lumière qui passe au travers des trous fait une ombre au sol
Illustration du principe de la technique d’imagerie par masque codé. Une source lumineuse
(par exemple une source astrophysique) va, en traversant le masque, laisser un motif d’ombre et de
lumière unique enregistré par le plan de détection (représenté ici par la feuille de papier
quadrillée). En connaissant le motif du masque et l’enregistrement du plan de détection, on
peut reconstruire la position de la source. © SVOM@APC, CEA

« Le seuil de détection très bas, à 4 keV, a rendu la fabrication de ce masque codé extrêmement complexe. En effet, contrairement à tous les autres masques codés développés jusque-là dans le domaine spatial, celui d’ECLAIRs ne pouvait reposer sur aucune structure porteuse car cette structure aurait absorbé les photons en dessous de 15 keV. » explique Alain Givaudan, chef de projet à l'APC.

Pour résoudre cette difficulté, il a fallu concevoir le premier masque codé autoporteur. Il est l’accomplissement de plus de dix années de développement, temps nécessaire pour concevoir et fabriquer deux modèles intermédiaires de validation pour arriver à ce masque unique en son genre. Sa conception innovante lui permet de résister aux très hauts niveaux de vibrations qu’il subira au décollage de la fusée chinoise qui l’emportera en orbite en juin 2022.

La partie codante du masque codé est faite en tantale, un matériau très dense (densité de 16,4), fortement opaque aux rayons X. La feuille de tantale ne fait que 0,6 mm d’épaisseur. Au-dessus et en dessous de cette fine feuille, des masques en titane épais permettent de rendre le masque résistant. Un astucieux retrait géométrique évite aux nervures de titane d’être dans le champ de vue de l’instrument. Tout se passe donc comme si elles n’étaient pas là et que seule la feuille de tantale était utilisée. Le choix du motif du masque, la taille et la disposition des trous, s’est fait après la simulation de centaines de milliers de motifs. La sensibilité et la précision de localisation ont ainsi été optimisées.

« Une grande étape a été franchie, la réalisation du masque étant considérée comme l’un des points les plus délicats dans la réalisation de l’instrument ECLAIRs. C’est l’aboutissement de plus d’une dizaine d’années de travail en étroite collaboration avec nos partenaires du CNES et du CEA. » se réjouit Cyril Lachaud, responsable scientifique du projet à l'APC. Grâce à ses nombreux instruments tant au sol que dans l’espace, SVOM sera en 2022 une mission incontournable dans l’exploration scientifique du ciel transitoire.

Contact

Cyril Lachaud
Enseignant-chercheur responsable SVOM à l'IN2P3 et au laboratoire APC.
Alain Givaudan
Ingénieur et Chef de projet équipe SVOM "masque codé" à l'APC
Vincent Poireau
DAS Astroparticules et cosmologie