Stéphane Grévy, lauréat du prix Joliot-Curie 2018

Distinctions Physique nucléaire

Stéphane Grévy est expérimentateur en structure nucléaire de basse énergie, domaine dans lequel il a apporté des contributions majeures, et actuellement directeur de recherche au Centre d'Etudes Nucléaires de Bordeaux Gradignan (CENBG).

Pour l’originalité de sa démarche scientifique, pour son profil complet et diversifié, et pour sa force de proposition ainsi que pour la portée scientifique de ses résultats, la Société Française de Physique lui a décerné le prix Joliot-Curie 2018.
 

Dès le début de sa carrière, ses activités ont porté sur l'étude des nombres magiques dans les noyaux exotiques riches en neutrons. Il a proposé et effectué un grand nombre d'expériences qui ont permis de comprendre l'évolution de la structure nucléaire dans la région de la fermeture de couche N=28. L'originalité de son travail a consisté à mettre en oeuvre différentes approches expérimentales pour l'étude de ces noyaux exotiques produits dans des accélérateurs et ne survivant que quelques millièmes de secondes : spectroscopie par décroissance, spectroscopie γ en vol, spectroscopie des isomères gamma/électrons, excitation Coulombienne.

Sa contribution majeure fut la mise en évidence du développement progressif d'une région de déformation entre le noyau doublement magique et sphérique 48Ca et le noyau fortement déformé 42Si. Un de ses résultats marquants fut la première mesure de l'énergie de l'état excité Iπ= 2+ du 42Si, noyau extrêmement exotique car comportant 28 neutrons pour "seulement" 14 protons (les noyaux stables présents sur terre ont à peu près le même nombre de protons et neutrons). La très faible énergie mesurée, 770 keV, cinq fois moins qu'attendue pour un noyau magique, est une preuve indiscutable que ce noyau est déformé. 

Ce résultat obtenu au GANIL remettait en cause le caractère "magique" de ce noyau annoncé peu de temps auparavant par une équipe de Florida State University dans la revue Nature.

Après sa thèse à l'IPN d'Orsay portant sur les noyaux à halos et un séjour post doctoral au NSCL de Michigan State University, il est embauché en 1998 au LPC Caen. En parallèle de son étude des nombres magiques, il participe à la mise en place du programme des noyaux super-lourds au GANIL. Plusieurs expériences utilisant le spectromètre LISE ont été effectuées et il s'est notamment investit dans la mise en place du système de détection. En 2004, il rejoint le GANIL et devient le coordinateur scientifique du spectromètre LISE, grande responsabilité puisqu’à cette époque, la moitié du temps de faisceau du GANIL était attribué à cette ligne de faisceau.

En 2010, il rejoint le groupe Noyaux Exotiques du CENBG et prend la responsabilité du projet PIPERADE (PIège de PEnning pour les RAdioisotopes à DEsir). ayant pour but, dans le cadre du projet SPIRAL2, de développer un ensemble de piégeage innovant basé sur un double piège de Penning. L'objectif recherché est de pouvoir accepter un grand nombre de noyaux exotiques (jusqu’à 106-107 ions par seconde) - afin de les trier avec un pouvoir de résolution 10 fois supérieur à un spectromètre magnétique - et de distribuer des faisceaux de noyaux exotiques ultra purs aux différentes expériences du hall DESIR.